IESCHOUA
LA PARABOLE DES VIGNERONS HOMICIDES
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LA PARABOLE DES VIGNERONS HOMICIDES Marc 12, 1-12 Par Anselm_Grün Après l'expulsion des marchands, Marc relate le débat de Jésus avec les grands prêtres, les lettrés et les anciens, et, au cœur même de la discussion, il insère - une fois encore selon sa construction en sandwich -la parabole des mauvais vignerons. Le sens de ce récit n'est pas aussi riche que d'autres, interprétables selon une pluralité de plans. Ici, Jésus raconte seulement sa propre destinée, et ses auditeurs comprennent fort bien ce qu'il veut dire (12,12). L'apologue commence par un rappel d'Isaïe 5,1 sq., le « chant de la vigne » : « Un homme plante une vigne. Il l'entoure d'une clôture, creuse une cuve sous le pressoir et construit une tour» (12,1). Dans l'Ancien Testament, la vigne est une image récurrente du peuple d'Israël. C'est Dieu lui-même qui a planté cette vigne ; il la loue à des vignerons, qui représentent sans doute les dirigeants du peuple. Par trois fois, il envoie ensuite un serviteur «pour recevoir d'eux une part des fruits». Ces trois serviteurs sont les prophètes que Dieu n'a cessé d'envoyer à son peuple, mais que celui-ci n'a que trop souvent assassinés. On peut s'étonner que Dieu soit aussi patient avec son peuple ; il réagit à son infidélité tout autrement que notre entendement humain s'y attendrait. Jésus illustre cela de façon très concrète : « II ne lui reste que son fils, son aimé. Il le leur envoie en dernier, en se disant: "Mon fils, au moins, ils le respecteront"» (12,6). Jésus montre ainsi en toute clarté à ses ennemis qui ils tentent de mettre à mort : le Fils bien-aimé de Dieu. Ce verset interprète les mystères de l'Incarnation et de la Passion : en Jésus, Dieu nous a envoyé son Fils, manifestant par là son patient amour pour nous. Mais son dessein est réduit à néant par le raisonnement contraire des vignerons : « ..."Celui-là, c'est l'héritier. Allons ! Tuons-le, et à nous l'héritage !"» (12,7). Ainsi font-ils, jetant son cadavre hors de la vigne pour qu'il devienne la proie des bêtes sauvages ; selon le droit juif, ils commettent ainsi un sacrilège (Grundmann, p. 323). Par cette parabole, Jésus dévoile les agissements de ses adversaires ; c'est sa dernière tentative pour ouvrir leurs yeux et leur faire comprendre toute la portée de leur projet criminel, afin qu'ils réfléchissent et y renoncent (cf. lersel, p. 193). Or cette tentative échoue. Le lecteur sait qu'ils vont tuer en lui non plus seulement un prophète, mais le Fils bien-aimé de Dieu. Cette parabole est suivie d'une autre, très courte. Jésus y cite le Psaume 118 que ses disciples ont chanté en son honneur lors de l'entrée dans Jérusalem ; il l'interprète à sa façon, avec la liberté qui le caractérise : «La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs c'est elle qui est devenue pierre d'angle... » (12,10). Cette image révèle que l'ancien Temple est condamné, privé de sa légitimité par la mort de Jésus ; sa mort et sa Résurrection édifient un nouveau Temple ouvert à tous les humains. Jésus interprète sa destinée non pas comme une défaite, mais comme un acte de Dieu : «... C'est là l'œuvre du Seigneur et elle est admirable à nos yeux» (12,11). En citant ce Psaume, Marc veut ouvrir les yeux du lecteur afin qu'il reconnaisse le miracle que Dieu va opérer en Jésus : son Fils, que les grands prêtres rejettent et tuent, il ne l'abandonnera pas, il le ressuscitera et le prendra comme pierre d'angle du Temple qu'il bâtit pour tous les peuples. Extérieurement, Jésus échoue dans l'épreuve de force avec ses ennemis, mais la réalité profonde est qu'il reste dans la main de Dieu ; nul ne peut l'anéantir contre la volonté divine. Le triomphe apparent de ses adversaires scelle au contraire leur défaite, alors que sa mort devient la source du salut pour ceux qui le suivent. Jésus Christ est la pierre que les bâtisseurs ont rejetée, non seulement dans sa mort et sa Résurrection, mais aussi dans son enseignement. La parabole des vignerons est placée au centre de la controverse de Jésus avec ses adversaires. Pendant son ministère en Galilée, il a parlé de Dieu « avec autorité » et expliqué en paraboles le mystère du Royaume des cieux ; sur le chemin de Jérusalem, il a enseigné à ses disciples le mystère de sa marche vers la croix et la Résurrection ; à Jérusalem, dans son débat avec les grands prêtres, les lettrés et les anciens (11,27), il montre en quoi sa conception de la spiritualité diffère de la leur. La foi que Jésus proclame repose sur trois piliers. D'abord, la liberté : l'homme appartient à Dieu et non à l'empereur, qui n'a donc pas de pouvoir sur lui. L'homme est l'image de Dieu, et il ne vit conformément à sa nature que s'il fait retour à Dieu et se remet entre ses mains, au lieu d'agir en fonction de l'opinion des hommes (12,13-17). Le deuxième pilier, c'est la foi en la résurrection des morts. Dieu «n'est pas un Dieu des morts, mais des vivants » (12,27) ; dans la mort, nous ne cesserons pas d'être en communion avec lui, nous le verrons en permanence, comme les anges. Le troisième pilier, c'est l'amour pour Dieu, pour le prochain et pour soi-même (12,28-34). Sur ces trois piliers fondamentaux, Jésus bâtit le nouveau Temple où l'homme vénérera Dieu comme il convient. |
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Modifié le 14-02-2012. |